De Ouagadougou, Burkina, le 1er janvier 2010

04 mali

Swiiit.... swiiit... cruuunch..., « attention à droite », crrrrck...., « à gauche », flouttt, flouttt, « çà va toucher !!! », « mais non c'est bon !!! » clac, rrrrak, « on a touché ? » « Ouais, on a même perdu quelque chose ».

Après neuf heures de conduite, les 70 km parcourus nous paraissent bien peu sur notre carte. A propos, M. Michelin, il faudra revoir votre carte « Afrique nord et ouest ». Après Kayes, au nord du Mali, vous indiquez direction sud-est une route secondaire, surlignée de vert, donc pittoresque. En fait, nous avons trouvé une piste, jusqu'à Bafoulabé et même au-delà du bac non-répertorié, qui n'est plus entretenue depuis des lustres. Même les guides locaux ne l'empruntent plus depuis longtemps avec leur 4x4. Notre camionnette, qui n'en est pas un, a réussi l'exploit (et je reste modeste) de franchir tous les obstacles sur 300km. Trois jours et demi, d'accord, mais il faut préciser que cette piste-là cumule toutes les options. D'abord cassante, avec un peu de tôle ondulée. Puis des cailloux, des rochers en marche d'escalier.

Du sable mou, profond, très profond. Là, il ne faut surtout pas hésiter : foncer et choisir en quelques dixièmes de secondes le bon passage. Et puis, il y a les marigots : une pente à 20%, l'eau, et la remontée à 20 /25%, et là tout peut se compliquer si l'on a du sable mou...J'allais oublier les ornières. Heureusement très dures, la saison des pluies étant loin. Il suffit donc de trouver, simplement, deux ornières ayant l'écartement des roues. On vise bien, et la ballade se fait à 50 ou 60 cm du sol. Et pour finir les termitières. Les petites, cachées dans les herbes, sont aussi dur qu'un plot de béton.

Bilan de cette promenade : la protection carter arrachée (nous la remplaçons à Bamako avec une tôle en acier galva), beaucoup de sueur froides, des crampes pour Joce (tant elle se cramponnait sur son siège), quelques milliers de rayures sur la carrosserie, et le positif : notre petit véhicule a réussi son droit de figurer en « tout-terrain ». Ce qui est de bon augure pour traverser le Cameroun ou le Gabon. Enfin, nous verrons le moment venu !

Nous sommes donc au Mali. A la frontière tout se passe au mieux. Pas de policier, pas de douanier sur la route. Non ! Ils sont dans leur bureau et tamponnent gentiment les papiers. Ils sont super gentils et ne nous ennuient jamais. Pas de corruption ici... Une petite anecdote sympa : un policier, posté à l'entrée d'un village, sous le baobab bien sûr, nous fait signe de nous arrêter (chose très rare, en général c'est juste un petit salut de la main) :

vous avez votre ordre de mission ?
Euh... non.
Ah............ et qu'est-ce que vous avez ?
Mon passeport, ma carte-grise.
Ah............ et tout est en règle ,
Oui, bien sûr
Ah bon ! (il paraît très soulagé). Et çà va ,
Oui çà va, et toi çà va etc etc (la famille y passe).
Bon, eh bien bonne route !

Ils sont vraiment gentils.

Pas seulement les policiers ! Les maliens en général. Il faut voir leur sourire, plein de douceur, de bonheur, lorsqu'on les salut. Du plus petit au plus grand, il semble que ce soit un grand honneur, pour eux, qu'un toubab leur parle. La joie est totalement partagée.

Depuis le Maroc, c'est le premier pays que l'on sent en plein développement. Tout est propre. Chacun balaie devant chez lui. Même Bamako, la capitale, surprend. Alanguie sur les rives du Niger, entourée de cinq collines. C'est un vaste chantier. Mais déjà de belles avenues arborées accueillent l'étranger. Des parcs d'agrément fleurissent çà et là. Les étals de fruits ou légumes sont un régal. Nous nous égarons avec bonheur dans les marchés du centre-ville. Au marché des artisans, Joce achète une belle paire de sandales. Son choix est difficile. Cinq, dix artisans l'entourent. Lui mettent des chaussures l'un après l'autre. « Mais c'est trop grand, c'est au moins du 44 ! » « Mais non, tu verras, tu seras à l'aise ». une demi-heure plus tard Joce a chaussure à son pied.

A part les pistes pré-citées les routes nationales sont plutôt bien entretenues, de nombreux péages les jalonnent (en général 500Fcfa). Et c'est donc à bonne allure que nous filons vers le pays Dogon.

Ce soir, dans la cour d'un hôtel à SAN, je pense à quelques rencontres faites sur notre route. Il fait bon pour un mois de décembre. Il est 22h, je suis en chemisette. Il y a peu de moustique. Tout va bien. L'esprit peut vagabonder. Je pense à Helen, cette jeune anglaise qui file en « bike » vers Capetown. Au dernières nouvelles, elle serait en Casamance. J'espère que tout se passera bien pour elle. Et puis il y a cet autre illuminé, Gérard ! Un jeune de ma classe (même quelques mois de plus). Un fou ? Non, il va au bout de ses rêves ! Et c'est super. La même route que nous. En vélo, et en solo ! Pour le suivre ? Voyez son site « zagafrica ». Je pense aussi à ce jeune couple, du Cantal, avec un enfant de 4 ans, tentant de passer du Sénégal en Guinée-Konakri par les montagnes. Malgré plusieurs tentatives, leur 4x4 ne pouvait passé. Y sont-ils ? Je ne sais pas. Je pense à Adrien, ce jeune d'Alberville, venu en vacances ici, dépenser son argent perso, pour donner des cours de bureautique. Nathalie, propriétaire de l'hôtel « Le Faro » à Ségou (tiens, cela me fait penser que par là il y a des lamantins dans le fleuve Niger, extra !). Un hôtel très recommandable : nickel du sol au plafond, au bord du fleuve. La cour nous a très bien accueillie. Nathalie fait vivre de nombreuses familles du pays. Idem pour l'hôtel-camping « Mon P'tit Repos » tenue par Annie et Jean-Marc, des angevins super sympas, du côté de Mopti, à Sévaré. Je n'oublie pas non plus Bernadette et Michel. Nous avons traversé la Mauritanie, visité le Sénégal ensemble. Que de bons moments ! Nous sommes séparés depuis Bamako, ils vont en Côte d'Ivoire. Nous nous retrouverons d'ici 3 mois environ et ferons un autre bout de route ensemble. Avec joie ! Enfin, Domi et Jean des « froggies » qui vivent à Capetown, séduits par notre petite aventure -via internet- ils nous attendent pour nous accueillir, là-bas, en Afrique du Sud. Sympa, non ?

Et puis n'oublions pas notre petite compagne : Chipie. Cool au possible. Un peu fatiguée ces jours par la grosse chaleur, elle supporte, malgré tout, les caresses d'innombrables enfants. On veut nous l'acheter. Mais elle n'a pas de prix. Un peu triste depuis que sa copine Papaye est partie avec ses maîtres. Plus de promenade matinale en duo. La solitude... On essaie de compenser !

Nous arrivons à Djenné, après avoir traversé la rivière Banni par un Bac. Djenné, ville du centre du Mali, située sur le Bani, au sud de la ville de Mopti, dans le Sahel. Djenné, est une ville commerciale, lieu de vente des productions de la zone irriguée environnante (riz, coton...) mais également une ville religieuse.

Djenné prit son essor sous l'empire du Mali (XIIIe-XVe siècles), puis sous l'Empire songhaï (fin XVe-fin XVIe). Les Français firent la conquête de Djenné et l'intégrèrent avec tout le pays à l'Afrique-Occidentale française au XIXe siècle, puis, dans les années 1920, au Soudan français. Aujourd'hui environ 20 000 bozos, essentiellement, la peuplent.

Une grande mosquée domine cette ville, à l'architecture soudanaise. Avec ses murs de terre (banco) aux contreforts régulièrement espacés et aux nombreux pinacles, c'est un exemple caractéristique de l'architecture islamique en Afrique. Édifié au XVIe siècle, le monument fut entièrement rebâti en 1905.

Classée au patrimoine mondial, pour cette imposante architecture soudanaise en banco, elle n'en est pas moins repoussante avec ses égouts à ciel ouvert. Ses déchets trainent de partout : une poubelle sans couvercle. Dommage !

Puis nous faisons un petit tour à Mopti. Nous apprécions les alentours, avec leurs rizières, leurs lavandières, leurs pêcheurs.

Depuis deux jours il fait à nouveau très chaud et l'harmattan souffle. Cet après-midi le thermomètre est monté à 39°. Les nuits sont fraîches et nous requinquent. Il paraît qu'en France il gèle fort. Ce doit être une fable... Comme celle que Sarko raconte à propos des dangers du Mali... Le Président de ladite République a piqué, à juste titre, une grosse colère. Bien sûr un français a été enlevé sur ce territoire, très loin, dans le Sahel bien au-delà de Gao. Ce n'est pas une raison pour priver tout un pays d'un de ses revenus important : le tourisme. Empêche-t-on les étrangers de visiter la France ? Les faits divers pourtant font peur, vus de l'extérieur. Un assassinat par là, des vols par ci, vol à la tire sur les grands boulevards... les Corses qui s'énervent de temps à autres... Venez au Mali, il n'y a pas de problème !

Grande transhumance. C'est par milliers que les buffles (les vaches d'ici), accompagnés de bergers nomades -des peulhs ou des touaregs- quittent le Sahel pour rejoindre les verts pâturages des rives du fleuve Niger. Toute la famille suit. Perchée sur des charrettes tirées par des ânes. D'antiques 404 jouent également le rôle de déménageurs... De graves rixes opposent parfois nomades et sédentaires habitants des rizières dévastées par les bêtes. Il en est ainsi depuis des siècles...

Joce est moi avons décidé d'aller errer au pays Dogon, à la rencontre du peuple des falaises, une quinzaine de jours. D'abord tous les deux. De petits villages en bivouacs sauvages ou « à la ferme ». Belle réussite. A Borko c'est jour de marché. Chipie soulève l'enthousiasme général. C'est avec une meute d'enfants aux trousses que nous parcourront les étals puis les rues de ce charmant village. Fleuron du monde Dogon et l'un des villages les plus septentrionaux caché dans le dédale des montagnes du Menthi formant une muraille de 900m de haut dominant le fleuve Niger. La ville se niche dans une vallée aux versants arides. Les sources donnent aux terrains qui se situent au pied de la falaise, de l'eau en abondance. Oignons, aulx mais aussi les mangues, bananes ou papayes y poussent allègrement.

Puis Hombori et ses massifs montagneux. Un mélange de culture songhay, peulh et dogon, touareg, mandingue, arabe, maure et belha. Hassan Maiga nous accueille dans une maison à côté de sa ferme, c'est « L'accueil Paysan ». Hassan nous fait entrer de plein pied dans le milieu Hombori selon une tradition d'hospitalité qui n'est pas du folklore... Deux heures après notre arrivée nous sommes invités au mariage de la fille de son frère (mais ce n'est pas sa nièce ???). Tout le village est là. Les boubous sont éclatants de couleurs. Tout le monde nous salue, discute. Nous remercie. Quelle ambiance. Comme le veut la tradition les festivités durent 3 jours. Au terme de ceux-ci le marié peut, enfin, consommer le mariage (à moins qu'il ne l'est fait auparavant, mais ceci ne nous regarde pas...). Nous abandonnons le premier jour. Faute de temps.

Tôt ce matin nous partons à l'assaut du vieil Hombori. Ses maisons forment un rempart au-dessus de la plaine. A un jet de lance de la route des razzieurs, le village adopta une architecture particulière qui lui permit de tenir son rôle de place forte. Nous nous égarons avec bonheur dans les ruelles étroites, se faufilant parfois sous les toits, suivant les traces de l'Empereur songhay Soni Ali Ber. Aujourd'hui c'est le chef du village qui nous accueille et nous souhaite la bienvenue. Au Pays Dogon le voyageur doit toujours se présenter au chef de chaque village visité, et si possible lui offrir quelques noix de cola. C'est, accompagnés d'une ribambelle d'enfants, parlant parfaitement le français, que nous verrons l'emplacement des fétiches chargés de protéger la ville ou le promontoire où l'on battait le tambour pour annoncer les nouvelles. Une petite merveille, Hombori !

La fin de cette journée, chaleur oblige, nous entraîne vers la dune rose de Hombori. Seulement dépassés par quelques fiers touaregs sur leur monture, nous nous laissons portés par les derniers rayons du soleil. Douceur, sérénité, solitude, bien-être... Le croissant de lune éclairera notre retour à « La ferme ».

Aujourd'hui nous sommes accompagnés d'Amadou, un « guide local », à la rencontre de villages dogons oubliés des touristes. Songho, puis Niongono. Ce dernier est resté très traditionnel, sans boutique à touristes, et un chef de village très accueillant. Il se dit centenaire, mais le siècle dogon n'a que 60 ans, puisque la semaine n'a que 5 jours, cela peut lui faire... bof, pas envie de calculer ! Mais il a bon pied, bon œil et une adresse sur internet ! Comme quoi rien n'arrête le progrès.

Notre guide, complètement perdu sur la falaise de Bandiagara, nous égare en voulant relier un autre village. La piste à 4x4 devient piste à vélo, puis champ de sorgho, pour finir immobile sur un plateau (on ne sait où) dans une mer de sable mou... Il est 18h (presque la nuit), nous montons donc le bivouac. Vers 20h deux bergers-nomades nous apportent un bidon de lait tout juste tiré du pie de leurs vaches. Ils nous font comprendre qu'ils reviennent dans un moment avec du thé chaud. Effectivement, une heure et demie plus tard, ils sont là. Un plat de pâtes et de la viande ! Quelle leçon, pour nous occidentaux qui n'accordons aucun regard à l'étranger. Nous avons passé une excellente soirée. D'éclats de rire en éclats de rire.... Et dès l'aube, ce ne sont pas deux mais 6 ou 7 nomades (peulhs) qui étaient là pour tirer notre cam' de sa mauvaise posture. Merci ! à vous qui ne lirez jamais ces lignes. merci de votre générosité, de votre accueil, de votre hospitalité.

Nous commençons de découvrir le Burkina-Faso (qui veut dire « pays des hommes intègres ») en entrant par le nord. Mais ceci est une autre histoire....

Toutes les photos MALI sont ICI

Pour tous les voyageurs qui veulent découvrir le Mali, autrement qu'avec les Tours Opérateurs, nous vous recommandons l'excellent guide de Michel DAMBLANT, que nous avons eu la chance de rencontrer à Hombori : « MALI. The natural guide » aux éditions Viatao. Dans toutes les bonnes libraires ou en envoyant un petit mail à Michel : micheldamblant@gmail.com.

Attention ! : ne prenez jamais un guide qui ne vous a pas été recommandé par quelqu'un de fiable, choisissez-le sur place, et si vous rencontrez Amadou Konaté (né en 1980) passez votre chemin, il n'est pas guide.

Bilan Mali :

Monnaie : Franc cfa – 1 € = 655 Fcfa - Carburant, partout sans problème : G.O. 0,80€/l

2700 km – 360 l de G.O. 21 jours – 6 bivouacs en brousse – 10 nuits en campement – 5 nuits dans les cours d'hôtel ou autres.

carnet de route mali