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CapOcap, Le blog de Xavier

Préparatifs, carnets de route d'un voyage de plus d'un an à travers l'Afrique du nord au sud.

Carnet de Route au Sénégal -II-

Publié le 14 Décembre 2009 par Xavier in Carnet de Route Sénégal - II-

De Bamako, Mali, le 14/12/2009

 

2009-12-04-Village-Bassari-Ethyolo--35-.jpgNuit sans lune. Nuit noire. Je ne vois rien. Je perçois le glissement feutré de pieds sur le sol. Quelques lucioles s'allument. Rapidement elles s'éteignent. Où suis-je ? Dans un rêve ? A moins que je n'ai quitté ce Monde ? Des tissus frôlent mon bras gauche. La voûte céleste est illuminée de mille feux. Quelques paroles, incompréhensibles sont échangées non loin de moi. Je ne vois personne. Je suis certain qu'il y a du monde tout autour.

Tout à l'heure, au crépuscule, après avoir traversé une forêt envahie par de hautes herbes, j'ai débouché sur une plate-forme. Très propre. Quelques cases en délimitent le pourtour. Une grande marmite sur un feu de bois devant l'une d'elle. Une bonne odeur envahie mes narines. Une femme, torse nu remue le contenu. Habilement. Sans débordement. Tout est calme. Serein. Doux. Lorsque le chef de village d'Etagh en pays Bassari m'accueille il me remercie d'être là. A mon tour je le remercie de m'accueillir et de m'offrir cet immense privilège : assister à une cérémonie, très confidentielle chez les Bassaris, la fête des Masques. Hormis le chef du village d'Etagh, seules 5 ou 6 femmes, souvent affublées d'un bébé sur le dos, s'activent à la préparation de la fête.

Me souvenant de cet instant, je ne rêve donc pas. Je suis bien au Paradis, dans un coin oublié de cette Terre, aux confins du Sénégal et de la Guinée.

Soudain, précédés du sifflement d'une flûte, des sons gutturaux entonnent un chant. Puis des clapes de mains, très rythmés, les accompagnent. J'écarquille les yeux. Je finis par distinguer des dizaines de jeunes enfants. Autant de jeunes filles. Dans un ensemble parfait ils frappent des mains. Au centre du cercle, ainsi formé, je finis par distinguer quelques grandes formes. Mi-humaines, mi-diables. Les sons d'outre-tombe, émis par celles-ci, me donnent un frisson.

2009-12-05-Fete-des-Masques-Etagh-Pays-Bassari--12-.jpg

La danse, les chants, les clapes vont durer des heures.

Lorsque la lune se lève enfin, j'espère bien distinguer un visage sous ses masques. Peine perdue. Ils garderont leur secret. L'objectif est atteint. En même temps, ces jeunes récemment initiés, ont remercié le chef du village pour leur avoir procurer du travail et de quoi trinquer à cette occasion.

Plus tard, dans la nuit, après être allé, de case en case, goûter au vin de palme ou à la bière de mil et manger des boulettes de porc-épic, ma tête tourne un peu et le rêve se poursuit...

Les Bassaris (1% de la population du Sénégal) sont connus pour avoir conservé leurs traditions. Ils habitent dans les villages les plus inaccessibles du pays. Cachés dans les montagnes, on ne peut souvent les atteindre qu'à pied. Leur langue n'est connue que d'eux seuls. Certains ont été évangélisés par les missionnaires présents, seulement, depuis 1975. D'Ebarack à Salémata, où nous bivouaquons à la Mission du Père Marcel qui nous accueille très gentiment, la hiérarchie est la même qu'au début du siècle dernier, lorsque les premières invasions Peuls les ont poussés sur les plus haut sommets du Fouta Djalon. Ils n'ont pas plus qu'une dizaine de nom de famille (tous commencent par la lettre B).

2009-12-04-Village-Bassari-Ethyolo-Chef-Vill-Balingo--1-.jpg

Balingo, chef du village d'Ethyolo que nous avons découvert après un très dur parcours, nous raconte la « tradition » de ce peuple animiste. Il nous explique l'initiation des jeunes... C'est un secret entre lui et ses hôtes.

Mais avant d'arriver au pays Bassari, tout au sud-ouest du Sénégal, là où il n'y a plus de route mais seulement des sentes, le voyage est long depuis la capitale. Dakar pas plus que Sali-Portugal, le St-Trop' sénégalais, n'auront laissés une empreinte ineffaçable à nos yeux. Pour l'une, et c'est identique aux capitales en général, c'est la foule, les véhicules bruyants, la pollution extrême et la misère pour la majorité des habitants -Wolofs, essentiellement, fuyant leur campagne pour l'enfer-. Pour l'autre, un tourisme de masse, des constructions de luxe dans un lieu réservé aux étrangers et fermé à la population locale... on passe vite.

03-senega.jpg

Nous arrivons à Bicole par une piste semée d'embûches. Le sable est mou. Il attire irrésistiblement nos roues en son sein... Ce village, un peu perdu au nord de Fatick, en bordure du fleuve Salum, est très représentatif de l'Afrique que nous recherchons. Des cases en banco -pisé d'argile et paille- pour le gros œuvre et une toiture en sorgho. Réparties en « carré » pour chaque famille, elle couvre une très grande superficie. Ici pas de véhicule à moteur. Des calèches, tirées par un cheval, filent à toute allure. Sans bruit. La seule boutique pour les 2 ou 3000 habitants subvient aux besoins de première nécessité. Un verre d'huile par ci, un sachet de sel par là, 2 cigarettes pour celui-là et un bonbon pour cet enfant contentent les uns et les autres pour aujourd'hui. Demain étant un autre jour, ils pourront peut-être acheté du sucre ou cette bouteille de Coca glacée. Enfin ! demain ou après-demain. Pas d'électricité. Seulement trois panneaux solaires dans tout le village. L'un pour le Centre de santé, où nous bivouaquons dans la cour 5 ou 6 jours, l'autre à la boutique et un troisième que nous n'avons pas vu Quant à l'eau tirée à 375m de profondeur par un forage, elle arrive, via un château d'eau sur des bornes-fontaines dispersées çà et là.

Ici, et dans les villages voisins, Keur d'Afrique que nous soutenons s'y est beaucoup et bien investi. Les jardins des femmes verdit à merveille après l'hivernage -période de fortes pluies, de juin à septembre-. Tomates, oignons, salades, choux et autres légumes commencent à sortir de terre. Une terre peu riche certes, mais l'apport de fumier et un arrosage bi-quotidien sont très efficaces.

Deux écoles primaires -l'une privée, l'autre laïque- reçoivent quelques 450 élèves. Rendez-vous dans « La case des écoliers », pour découvrir l'une d'entre elle.

Ce samedi-là les moutons sont à la fête. Enfin, c'est une façon de parler. Tôt le matin, chaque famille musulmane égorge la pauvre bête. « Tabaski » oblige. Le monde musulman célèbre ce jour-là, le souvenir d'Abraham qui là-haut sur la montagne fit de même, il y a quelques années de cela... Ailleurs, on appelle ce jour l'aïre.

Pour ne pas être en reste les catholiques font la fête le lendemain. Nous y sommes invités. Chaque quartier fait une démonstration de danse fantastique. Les photos sont plus explicites qu'un long discours...

Cette région est peuplée par les Sérères. Vivant principalement entre Thiès et l'embouchure du Saloum. Il semble que les Sérères habitaient autrefois sur les rives du fleuve Sénégal, car les populations locales leur attribuent la plupart des vestiges anciens de ces régions. Ils en auraient été chassés au XIIe siècle par suite de la poussée des Almoravides qui détruisirent l'empire du Ghana, puis par l'arrivée des Wolofs qui les repoussèrent vers la région qu'ils occupent actuellement. Ils s'opposèrent également à l'islamisation des Malinké sous l'empire du Mali et comptent parmi ceux qui se convertirent au catholicisme à l'arrivée des Français (le président Senghor est Sérère, comme la plupart des hauts fonctionnaires). De filiation matrilinéaire, les Sérères pratiquent une agriculture et un élevage intensif, et rendent un culte à la terre, où reposent leurs ancêtres.

 

Après une pause déjeuner à Kaolack, 2€ par personne le Mafé à la viande, nous descendons aux confins du sud-ouest Sénégalais. Les paysages changent. La savane prend le dessus. Un peu plus loin la forêt exulte. Quelques phacochères, un peu coléreux, nous saluent au passage. Les singes grimpent habilement au faîte des arbustes. La RN1 devient très cassante. Un « nid d'autruche » non repéré et le voyage pourrait s'interrompre. Le ballet des véhicules devient chorégraphie improvisée. Un café nous est servi au bord du fleuve Gambie qui passe par là. Le lieu est magique. L'atmosphère plaisante. Avant d'entrer au pays Bassari, par 80 km de piste en latérite (latérite = 1 heure de dépoussiérage ou davantage pour l'intérieur du cam' et la douche pour nous afin de virer du rouge au blanc) et après plusieurs nuits de bivouac sauvage, nous prenons un campement à Kedougou. Pays des Peuls, venant essentiellement du Mali voisin. La ville est presque propre, bien qu'aucune rue ne soit goudronnée. Les gens très accueillants nous séduisent par leur gentillesse.

2009-12-04-Salemata-Bassaris--11-.jpg

Même les gamins oublient de dire « cadeau ». Ici on préfère « bonjour, çà va ? », et nous répondons inlassablement, du matin au soir, 3 fois, 4 fois ou plus à la même personne si on a la chance de la croiser et re-croiser : « Et toi, çà va ? Ta famille va bien », « oui et.... » etc... C'est bien sympa ! Et au moins nous sommes sûrs de bien aller ! Ce qui est vrai après tout !

Maintenant nous rejoignons rapidement le Mali, par Kayes au nord. L'ambassade s'est un peu trompée pour nos visas, et il va falloir en ressortir avant le Jour de l'An. Dix jours de moins que prévu...

Mais ceci est une autre histoire !

Bonnes fêtes de fin d'année à Tous, MERCI pour tous vos coms ou vos mails, pardon de ne pas répondre à tous ......

vous êtes supers !!!!!!!!  Bizzzzzzous !

 

Bilan Sénégal :

1920 Km - 235 l. de G.Oil à 0,83€

9 nuits en campings

3 en bivouacs

15 dans les cours de Caritas ou de Mission.

 

Toutes les photos Sénégal II sont ICI

 

 

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C
<br />        Merci pour cette magie du voyage et pour ces éclats de soleil sur la neige roziéroise.<br />        Je voulais vous envoyer un magnifique poème de Henri MICHAUX sur l'Afrique, mais je ne l'ai pas retrouvé!! Mais votre périple est bien sûr un poème qui vous<br /> comble. Vous en reviendrez plus riches pour continuer à avancer sur les chemins de plus en plus difficiles de la vie.<br /> <br /> <br />
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